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[BLOG-FESTINABOY#11] BILAN des RADARS DES PYRÉNÉES.

10-09-2020, 08:04 - Antoine Vayer

RECORD MUTANT dans le col de PEYRESOURDE ?

Pour tirer un bilan de nos radars en watts et en surpuissance, je pourrais parler et écrire « sobrement » comme Frédéric Portoleau qui calcule depuis 30 ans les performances des coureurs cyclistes. Il n'est pas d'accord sur certaines de mes interprétations, moins sobres que les siennes.
Voici les miennes.



SAMEDI, Tadej Pogaçar a battu un premier record de ce Tour, celui de la montée du col de Peyresourde par le versant Est depuis l'intersection avec la vallée d'Oueil. Il a gravi les 9,8 km en 24min35s à 23,94 km/h de moyenne sur cette pente moyenne de 7,54%. Le précédent record appartenait à Vinokourov et Mayo. Cela m'a affolé un peu. Il a largué tout le monde pour ce faire. Vinokourov et Mayo ce sont deux immenses dopés avérés, avec un temps de 25min24s établi lors du Tour de France 2003. Des références. Nous pourrions dire qu'en 2003, Vinokourov, suspendu pour transfusion autologue ensuite, avait mené sur presque la totalité de l'ascension.

Cette année aussi, le Slovène Pogaçar a roulé seul 50% du temps pour lâcher tous les autres favoris et refaire une bonne partie de son retard, pris sur le plat pendant l'étape de bordures. Après observation des images ainsi que de la météo, on peut considérer un vent nul pour l'étape. La puissance étalon de Pogaçar estimée est de 462 watts*, environ 6,7 w/kg en fin d'étape ! Si on se limite à la portion finale, Pogaçar a même développé l'équivalent de 484 watts étalon pendant 11 minutes, soit 7w/kg si 64kg ! L'étape était plus longue en 2003 avec six cols à gravir. En tenant compte de l'évolution du matériel, d'un vélo plus lourd pour le Kazakh, les performances apparaissent équivalentes. C'est tout aussi monstrueux je dis.

La performance de Pogaçar confirme le même côté stupéfiant du mois de février avec celles de Quintana : 462 watts étalon au Ventoux pendant 28min05s ! Le niveau de performance est en hausse pour quelques ténors ?! C'est un retour aux années folles pour certains ? On dirait bien, comme je l'évoquais dans ma chronique #2. Nous nous rapprochons, pour les meilleurs, du niveau en montagne miraculeux de Lance Armstrong. Ils ne vont tout de même pas oser le dépasser ?

Les autres favoris du Tour, Roglic, Quintana, G. Martin, Bernal, Lopez, Bardet, Landa, Porte, Uran, Adam Yates ont développé l'équivalent de 445 watts étalon pendant 25min20s soit un niveau d'ensemble vu sur le Tour de France il y a bien longtemps. C'est inquiétant.

Juste avant Peyresourde, le Port de Balès aussi a été gravi sur un rythme très soutenu à la puissance étalon de 406 watts (5,8 à 5,9 w/kg). Les principaux leaders ont gravi cette ascension dans la roue de Wout Van Aert en 33min52s. C'est une minute de plus seulement que le record détenu par Thibaut Pinot (2014). Mais cette année là, Balès était le dernier col de l'étape. Wout est plus fort que Pinot ? Peut-être.

C'est un autre Français, Nans Peters, qui a remporté l'étape. Il s'est glissé dans la bonne échappée. Il a abordé avec une large avance les deux derniers cols. Le Français s'est isolé avec Zakarin le russe, suspendu deux ans dans sa jeunesse (il a un bon diplôme de repenti), dans la montée du Port de Balès. Ils ont gravi ce col en 34min33s à une puissance moyenne de 402 watts étalon. Nans Peters est parti seul dans la descente du port de Balès. Zakarin n'a jamais pu revenir dans sa roue. Le Français a gravi le col de Peyresourde en 27min33s, à une puissance étalon de 413 watts étalon. On savait que Nans était un mec bien. Voir son blog qui date du confinement. Les coureurs qui expriment leurs opinions peuvent donc gagner. Certes, c'est en anticipant les « coups de pédales », en prenant une large avance avant le final.

Avec Pogaçar, Quintana et Roglic ont été les deux coureurs les plus impressionnants. Ils ont été les seuls à pouvoir suivre Pogaçar pendant quelques minutes seulement. Ce sera le podium final à Paris ?

Lors de la cinquième étape auparavant, pré-Pyrénées, les coureurs devaient gravir le difficile col de la Lusette peu avant le Mont Aigoual. Le peloton des favoris a gravi les 9,84 km à 8% de cette ascension en 30min18s, « au train ». La puissance moyenne a été seulement de 386 watts étalon. Pas de course derrière le vainqueur de l'étape, membre de l'échappée matinale, Lutsenko qui, avec ses 398 watts étalon de moyenne a établi une belle performance après avoir dispersé ses compagnons d'échappée partout genre puzzle... On connait trop bien le Kazakh volant, le fils spirituel de Vinokourov, qui l'appelle « bébé » Vino. C'est mignon.

Le lendemain DIMANCHE, deuxième record. Pogaçar vainqueur, décidément trop fort.

Roglic, Pogaçar, Bernal et Landa ont en effet établi une nouvelle meilleure performance collective record sur la montée de Marie-Blanque en 17min36s avec 452 watts étalon. C'est 23 secondes de mieux que celui collectif aussi du peloton des favoris emmenés par Lance Armstrong et Ivan Basso en 2005. Bernal a semblé mieux en jambes qu'en début de Tour de France.

La distance est de 5,33 km pour 10,32% de pente moyenne. Pour la première fois l'ascension du col de Marie Blanque était proche de l'arrivée (à 18 km). Avec une puissance de 6,5 w/kg sur presque 20 minutes. Il s'agit d'un niveau de performance assez courant depuis quelques années et donc moins impressionnant que la veille sur Peyresourde. Pogaçar a publié sa courbe de puissance sur Marie Blanque calculée avec son compteur dont on ne sait s'il est bien paramétré. Le Slovène utilise un capteur-compteur de marque Stages, loin d'être aussi fiable que d'autres. Il donne des watts réels, pas des watts étalons. Le Slovène pèse environ 66 kilos officiellement (c'est moins en réalité), ce qui n'est pas fiable non plus. Il ne pèse pas 70 comme fait le coureur étalon. Cependant, Pogaçar publie 434 watts mesurés sur son compteur de moyenne. Mais surtout il montre qu'il a sprinté, tenez-vous bien, à 980 watts avec Roglic au sommet, pour 15s à 881 watts en lâchant tout le monde. En cours d'ascension il a aussi produit six accélérations-sprints avec des puissances respectivement à 800 watts, 597 watts, 615 watts, 776 watts, 737 watts et 748 watts. Je ne peux pas m'empêcher de penser au Rasmussen de la grande époque qui sprintait avec Contador, juste avant qu'il ne se fasse exclure. Six sprints de cette intensité et de cette longueur sans faiblir ensuite dans une pente à plus de 10%. On rêve et on se moque du peuple du vélo.

Ces changements de rythme ont bien sûr fait rétrograder Guillaume Martin et Romain Bardet. Avec Nairo Quintana, ils ont montré quelques signes de fléchissement. On peut les comprendre, en concédant 12 secondes au sommet. Ils sont à 447 watts étalon pour toute la montée en suivant. Le Colombien Quintana est encore capable d'exploits, on le sait. Mais il n'a plus les moyens de récupération dans son équipe Bretonne peut-être, on verra dans les Alpes. Il est le seul, s'il retrouve son niveau de février à pouvoir contester la surpuissance des sanguins Slovènes.

L'étape a été très rapide: 39 km/h malgré les trois cols franchis. Le premier col, la Hourcère, a été gravi par le peloton sur un rythme de 400 watts étalon pendant 35min30s, ça commence à piquer. Le Suisse Marcel Hirschi s'est échappé dans cette ascension. Il a pris une avance conséquente de 1min35s sur le peloton avec une puissance étalon de 430 watts, puis 420 watts étalon au col d'Ichère puis enfin 391 watts étalon au col de Marie Blanque. Impressionnant. Il n'a été repris que dans les derniers kilomètres par le groupe Roglic-Pogaçar-Bernal-Landa. Il s'agit d'une grande performance athlétique. C'est un grand raid. Est-il à la hauteur des enchainements de celui de Hamilton 2003 qui l'avait commencé aussi dans le col du Soudet... ou de Landis 2006 ?! On peut comparer. Hirschi, entrainé par Cancellara dont on parle tant quant au fait qu'il ait pu utiliser un moteur pour certaines courses et issu du même village en Suisse, est-il un phénomène ? Dira-t-il comme son mentor dit que ses deux seuls moteurs, ce sont ses deux jambes?


Extrait du magazine La Preuve par 21, disponible en accès libre ici


Pogaçar a développé un 1200 watts mesurés compteur au sprint à l'arrivée pour l'emporter dans son match à cinq puisque le quatuor infernal a difficilement rejoint le Suisse ! C'est 18,75 w/kg, après quatre heures de course et trois montées de cols !! C'est une valeur exceptionnelle, cela correspond à 1500 watts pour un sprinter de 80 kg qui le fait après une étape plate. Ses sprints avant dans le col à 10% l'ont juste échauffé ?

Après neuf étapes, la vitesse moyenne du leader de la course était de 39,74 km/h, malgré les cinq étapes de montagne déjà effectuées dont certaines faites « en dedans ». On est plutôt pas mal, ou mal, c'est selon.

Après trois radars, Pogaçar est leader des watts, à 435 watts étalon de moyenne miraculeuse si elle se confirme. En deçà de nos prédictions sur la Lusette, c'est bien, mais bien au dessus dans les Pyrénées, on a peur. Roglic est à 428, Bernal à 427. Bardet à 426 comme Martin dans la zone suspecte pour l'instant.

Attendons un peu la suite. Cela doit normalement décliner pour les humains dans les radars Alpes et la moyenne générale du Tour, excellent témoin de la triche, devrait baisser... un peu. Roglic semble bien parti pour s'envoler vers le titre 2020, mais le plus fort en montagne, c'est Pogaçar.



Antoine Vayer

* Modification apportée le 27/09/2020 : des analyses complémentaires ont montré qu'il y avait bien du vent de dos en bas du col de Peyresourde avant Garin, d'où une correction qui fait passer le résultat final de 467 à 462 watts étalon