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Matthieu BOULO et son entraîneur Cyrille GUIMARD : Du peuple Breton ou Belge, lequel est le plus brave ? par Antoine Vayer

31-12-2016, 23:53 - Antoine Vayer

Conte Celte. Par Antoine Vayer avec la collaboration du farfadet prophète de la forêt de Brocéliande

Pourquoi tous les Armoricains, Celtes et Gaéliques doivent venir encourager Boulo au championnat de France de cyclo-cross de Lanarvily le dimanche 8 Janvier 2017 ?
Comment ces irréductibles Bretons vont ensuite conquérir le monde derrière lui en tentant d'envahir le plat Pays ?




Pour comprendre ce qui va se passer ce huit Janvier et l'hiver prochain en Flandres, il faut répondre à trois questions :
1/ Qui est vraiment Cyrille Guimard ?
2/ Qui est vraiment Matthieu Boulo ?
3/ Ce que représente Lanarvily ?

1/ Qui est vraiment Cyrille Guimard ?

Cyrille GUIMARD a affronté ou dirigé presque tous les personnages mythiques du cyclisme. Au point d'en être devenu un. Quand il commence sa carrière de coureur cycliste, il côtoie deux ans "Maître Jacques", surnom donné au premier quintuple vainqueur du Tour de France, le Normand Jacques Anquetil. Il profite même de son sillage et de son aspiration pour revenir à l'avant de la première course qu'il gagne chez les professionnels, le grand prix de Saint-Tropez.



Il devient surtout, et c'est là que l'histoire commence à prendre de l'intérêt, un des sérieux et vraiment rare rival du « cannibale », Le Belge Eddy Merckx, ce coureur légendaire ayant remporté aussi cinq fois la "grande boucle", le recordman mondial du nombre de jours à avoir porté la maillot jaune... 96 jours dans sa carrière. Cyrille Guimard avait sur le vélo un sens tactique et une habileté technique liés à une volonté de « penn kalet » (tête dure en Breton), fixée dans son regard et présente dans son phrasé. Il a remporté, entre autre de ses 97 victoires professionnelles, sept étapes du Tour de France, terminé deux fois troisième du Championnat du Monde et, tiens-tiens, est devenu champion de France de cyclo-cross en 1976, pour gagner avec son maillot bleu-blanc-rouge la semaine suivante à... Lanarvily.

En 1972, il n'a que 25 ans, sa carrière connaît son apogée en même temps que son déclin forcé.



Il vit le meilleur et le pire avec le Tour de France. Le Breton ose se poser en concurrent direct du "Cannibale". Il prend le maillot jaune à Saint-Brieuc, terme de la première étape. La photo de cette victoire est la seule qui prône, exposée, en poster, chez lui, en Brocéliande, où il est le voisin de Matthieu Boulo. C'est dire...

Mais le Belge reprend son bien à Saint-Jean de Monts. Guimard, "têtu comme un Breton", (Lavaret e vez eo pennek ar Vretoned, penn-kalet a wechoù !), ne s'en laisse pas compter. On assiste alors à un chassé-croisé historique et à un duel épique, homérique pour le port de la tunique de leader de la course entre les deux champions, le Breton et le Wallon, au fur et à mesure des étapes. En fin de Tour, Guimard est porteur du maillot vert distinctif du meilleur sprinteur. Il est 2ème au classement général, mais prêt à changer une nouvelle fois la couleur de son paletot pour l'arrivée à la Cipale à Paris.



Mais les séquelles récurrentes d'un accident en 1969 où il a été renversé par une voiture alors qu'il était sur son vélo ressurgissent. Sans le savoir, il s'est à l'époque fracturé la rotule (il subit aussi des lésions faciales et cervicales). Son genou fragilisé rend grâce trois ans après, au mauvais moment. Déjà, dans le massif des Pyrénées ses cartilages sont enflammés, irrités par une chondropathie tenace. Elle deviendra rédhibitoire. Il peut parfois à peine marcher. On doit le porter sur son vélo à un départ d'étape ! Il bat tout de même Merckx à l'arrivée en altitude du sommet du Mont-Revard pour quelques centimètres après l'avoir déjà fait à Aix-les-Bains, comme dans une blague Belge, lors même qu'Eddy lève les bras. C'est le premier affront suprême infligé aux Belges.



Le Breton va jusqu'au bout de son martyr. Il ne lâche rien. Mais usé jusqu'à la corde, il doit abandonner l'avant-dernier jour du Tour de France, peu après le départ de l'étape, sur la nationale 13, au kilomètre 13 de l'étape. Le signe du malheur pour un bonheur ?
Réputé pour sa ténacité durant sa carrière professionnelle, Cyrille Guimard se mute alors dans le rôle de directeur sportif et de bâtisseur d'équipe à 29 ans, de manager. Il y excelle et là aussi, il ne cède rien. Dans cette nouvelle profession, son sens aigu de la course, son appétit de recherche sur les nouvelles technologies en matière d'entraînement et d'aérodynamisme, sa curiosité d'éducateur et sa profonde connaissance des rouages du cyclisme, sa malice, son intelligence et son enthousiasme et, il faut bien le dire, son sens de la manipulation intelligente font immédiatement merveille. Il dirige victorieusement sept Tours de France sur neuf possibles entre 1976 et 1984 en étant mentor d'abord du petit Belge, Lucien Van Impe grâce à une astuce stratégique et tactique, qu'il raconte comme une histoire à tout le peloton. Guimard lave l'affront suprême infligé à Merckx en écrivant une page de cette histoire Belge.



Puis il dirige un autre Breton qui a le même regard que lui et la même volonté, Bernard Hinault. Ce dernier, tout jeune, seul échappé, tombe dans le Col de Porte lors du final de la course du Dauphiné Libéré 1977. Le Breton est plein de panache à l'orée de ses cinq victoires sur le Tour de France. Il est relevé du ravin par Guimard qui le poussera après qu'il ait mis pied à terre dans la montée terminale de la terrible côte de la Bastille, à Grenoble. Finalement, en sang, épuisé, en marchant, puis en remontant sur son vélo, il va, ils vont gagner. Deux « penn kalet » qui s'associent ne peuvent pas perdre. Boulo est maintenant avec Guimard.

  


Il assoie ensuite la carrière de Laurent Fignon (deux victoires au Tour) qui le taxe de « très grand directeur sportif mais humainement détestable ». Fignon n'est pas Breton, mais Parisien.



Il déniche Greg Lemond (trois victoires) en allant le chercher aux Etats-Unis, avant qu'il ne tombe dans les mains de l'équipe de Bernard Tapie

Le farfadet de la forêt de Brocéliande affirme qu'un évènement important a bercé le bébé Guimard, plus que le Tour de France et ses divers champions dirigés. Guimard est né en janvier 1947 : cela le liera définitivement au cyclo-cross et l'a amené cet hiver, à l'âge où on a le cul par-dessus tête (69 ans), à relever un nouveau défi avec Matthieu Boulo.

En effet, 1947, c'est quoi ? C'est Jean Robic dont les parents sont Morbihannais, donc Breton également, qui gagne le 1er Tour de France d'après guerre l'été 1947, sous les yeux du bébé. Et Jean Robic a dit que son plus beau fleuron a été aussi le 1er titre de champion du monde décerné pour cette discipline du cyclo-cross en 1950.



Auparavant, devant presque 100 000 spectateurs, c'est ce Breton Robic qui a gagné le 1er cyclo-cross de Montmartre toujours en en 1947 et 1948 (voir archive INA : http://www.ina.fr/video/AFE85001924). Les Français vont dominer une décennie ce Cyclo-cross au niveau mondial. Mais ensuite, ce sont encore les Belges qui ont, tel Merckx, « cannibalisé » outrageusement la discipline. Le Farfadet dit que Cyrille Guimard ne peut le supporter et que toute sa personnalité a été marquée à jamais pour la suite de sa carrière. C'est bien connu, ce sont les Bretons qui sont plus braves que les Belges. Cyrille serait né pour démontrer cela.

C'est sans doute pour cette raison que déjà, en 1983, il se rebiffe, comme il le fit avec Merckx, pour un coureur qu'il dirige dans son équipe Castorama, Dominique Arnould, qui n'est pourtant pas Breton. Ils dament le pion au Championnat du Monde à Corva à tous leurs adversaires. C'est un essai préparatoire, un deuxième affront suprême infligé aux Belges.



Guimard, le 4 décembre dernier, durant l'after-crêpes du Titre de Champion « du Monde de Bretagne » remporté par Matthieu Boulo près de Saint-Brieuc, a raconté par le menu comment il dut, la nuit veille de ce championnat du Monde en Italie, boucher en catimini un grand trou sur le circuit qu'Arnould n'osait pas sauter avec son vélo, contrairement aux Belges la veille lors de la reconnaissance. Comment les organisateurs l'ont recreusé le matin de la course avec une pelleteuse et comment, démonstration à l'appui, Guimard a réussi à le faire finalement passer à Arnould en le sautant avec son vélo à l'échauffement. Lavaret e vez eo pennek ar Vretoned, penn-kalet a wechoù ! Ne rien lâcher pour gagner devant les Belges. Toujours et encore.



En avance sur son temps, pionnier, scientifique et psychologue, adulé ou (et) détesté, dans un milieu où tout le monde aime tout le monde mais en se détestant, Guimard bouleverse et contrôle le paysage du cyclisme des années 70-80-début 90 en serrant les dents comme il a serré son guidon des années durant. On parle du modèle Guimard, de référence, et ce jusqu'à l'avènement du cyclisme "moderne" chargé de "biotechnologies" des années 90. Il termine sa carrière de manager en ne "coachant" qu'un an Lance Armstrong dans l'équipe COFIDIS, à cause du début du cancer de l'Américain en 1997. Guimard et le sponsor se séparent, le monde des affaires et du cyclisme n'étant pas un monde de « bisounours », avant que n'éclate le scandale de l'affaire Festina en 98 et que n'accouche Armstrong en 99, guéri du cancer.

Dés lors, Cyrille Guimard devient consultant pour certains médias TV et Radio, sillonne les courses sur route et les cyclo-cross, tout en entrainant quelques athlètes de manière individuelle.

En 2005, jusqu'en 2012, il reprend du service dans l'encadrement auprès de l'équipe cycliste professionnelle Roubaix Lille Métropole.
C'est en Juin 2009, au Championnat de France de contre la montre, à Saint Brieuc encore, qu'on lui fait rencontrer pour la première fois Matthieu Boulo, 19 ans, qui sort des rangs Juniors. L'idée, puisqu'il devient spécialiste de cyclo-cross et habite prés de Chez Cyrille, est que Guimard entraine Matthieu. Matthieu ose lui dire qu'il part en vacances ensuite avec ses parents. Il reçoit sa 1ère « chasse » qui va le marquer. C'est hors de question ! Si son jeune voisin veut travailler avec lui, il doit pédaler et courir, ne pas prendre de vacances. Le jeune novice baisse la tête et la collaboration débute par un blâme. Guimard le fait embaucher à Roubaix à 21 ans pour qu'il fasse de la route de mars à août, en préparation avec les professionnels mais pour le cyclo-cross hivernal qui se pratique de septembre à février.

En 2009, Guimard s'est également présenté à la Présidence de la Fédération Française de Cyclisme où il a siégé jusqu'en 2014. Il en part avec l'impression de ne jamais avoir été écouté pour le domaine de la gestion sportive.

Imprégné de l'histoire et de l'évolution du sport cycliste, milieu dans lequel il baigne en tant qu'acteur dans différents domaines depuis 50 ans, en 2013, avec la collaboration du journaliste Jean Emmanuel Ducoin de l'Humanité qui a suivi et couvert 25 tours de France (il a aussi été la plume de Laurent Fignon pour son livre « nous étions jeunes et insouciants »), il témoigne pour : « Cyrille Guimard, dans les secrets du Tour de France ».



De ce livre il dit, avec un grand éclat de rire : « je n'ai parlé qu'à 40%. A 90 % je pense que beaucoup seraient allés en taule, dont moi peut-être ». Il en profite pour infliger un troisième affront suprême aux Belges, en écrivant que « Merckx n'est pas populaire en France », qu'il est un cannibale considéré comme un grand champion certes, mais pas comme une star. Eddy, le « roi des Belges » comme il est surnommé, accepte mal le pic qui lui est adressé. Au Tour de France qui fait étape à Liège, les deux hommes se sont retrouvés récemment et Merckx lui a dit qu'il n'appréciait pas sa façon de penser. Guimard dit « qu'il n'est pas en conflit avec Merckx, ni avec personne, que ce sont les autres qui le sont vis-à-vis de lui ». Toujours est-il que son jeune disciple « penn kalet » Breton Matthieu Boulo serait celui qui infligera le quatrième affront suprême aux Belges... selon le farfadet de Brocéliande.

2/ Qui est vraiment Matthieu Boulo ?


« Guimard et Boulo » la transposition en Breton pour le cyclisme du roman Allemand de Herman Hesse, « Narcisse et Goldmund ».


Matthieu Boulo est un Breton pur beurre, au sens propre comme au sens figuré, depuis l'enfance, et jamais il n'a mis ses doigts dans la confiture. Il est né en 1989 à Vannes, peu de temps avant le 2ème sacre d'un poulain de Guimard, l'américain Greg Lemond. Vers 16 ans, en cadets, il fait son premier cyclo-cross et dés les rangs Juniors il monte sur la troisième place du podium du championnat de France, à ... Lanarvily, bien sûr après avoir conquis son premier titre de champion de Bretagne.

Il rencontre donc Cyrille Guimard lors du Championnat de France de contre la montre de Saint Brieuc en 2009, discipline pour laquelle il montre de réelles dispositions, puisqu'il montera en espoirs (moins de 23 ans) deux fois sur le podium du championnat de France. Par exemple, sur le prologue du Tour de l'Ain avec Roubaix, pour la saison route entre celles de cyclo-cross, il se classe 5ème entre Greg Van Avermaet, l'actuel champion Olympique de Rio, et Tony Gallopin, le Français porteur du maillot jaune ou bien 2ème de celui des Boucles de la Mayenne, ou 4ème au Tour de Normandie.

  


Mais ce qui le gratte, comme Cyrille Guimard, c'est le cyclo-cross ! C'est d'être aussi brave, sinon plus, que le peuple Belge, sans rien lâcher. Guimard dans l'équipe professionnelle de Roubaix lui donne cette occasion quatre ans durant, entre 2010 et 2013. Il fait des saisons sur routes avec une quarantaine de belles courses professionnelles françaises et participe aux coupes du monde l'hiver, la plupart juste au-delà de la frontière près de Roubaix, dans le plat pays ou en Hollande. Au niveau français il domine de la tête et des épaules la catégorie U23 en devenant vice-champion, puis deux fois champion de France, dont une fois en 2010 à ... Lanarvily, bien sûr.

  


Au niveau international espoirs, il est proche de toucher le graal. Il gagne deux coupes du monde à Pontchâteau et à Hoogerheide, termine 2ème de cette même coupe du monde en 2011, et 4ème du championnat du monde, non sans remporter le cyclo-cross international de... Lanarvily.

Certaines images des Podiums en coupe du monde U23 ravissent Cyrille Guimard. Les Belges, Néerlandais, Italiens sont une tête sous Matthieu qui est pourtant plus petit, tout comme Guimard est plus petit que Merckx.

  


Las, le passage en Elite, la philosophie et les moyens de Roubaix correspondent à une petite période de gamberge et de disette. L'appel de la « route » à l'image glorieuse et de s'offrir l'opportunité de participer au Tour de France et de belles épreuves se fait sentir. Pourquoi pas ? Le potentiel est là. Le vélo est souvent une histoire de rencontre. C'est un autre pur Breton de Brest, champion de Bretagne et fils de champion de Bretagne, qui a baroudé 10 ans en tant que professionnel chez Barloworld, Caisse d'Epargne, Crédit Agricole, Camaioro, Bretagne-Schuller qui l'introduit auprès de sa dernière équipe Anglaise, Raleigh, marque de cycles légendaire. Il est importateur en France et monte le premier « coffee-bike » en France sur le port de plaisance de Brest, près de l'aquarium et du pôle France de voile.

    


Matthieu se mue en leader sur route en 2014 pour cette équipe Continentale. Pour elle, il remporte trois succès à Redditch, Jersey et Newport dans les « Tour séries » qui sont l'objectif, finit 19ème de Tour de Grande Bretagne et lors des incursions en France, il assure avec les grands pros, par exemple sur le Tour du Haut Var, sur celui Méditerranéen, sur celui de Normandie (4ème), sur les coupes de France (7ème au GP Adélie et 14ème à Paris Camembert), etc.

    


L'équipe continentale professionnelle « Bretagne Séché environnement » qui est sélectionnée au Tour de France, séduite, lui propose un contrat d'un an en 2015, mais comme équipier. Matthieu participe à 76 jours de course au lieu des 40 habituels. Il exauce certains de ses rêves comme Paris-Roubaix et la Flèche-Wallonne, mais malgré son panache et son travail de tâcheron, il n'est pas sélectionné pour la grande boucle, ni gardé pour l'année suivante. Il comprend rapidement que dans ce genre de structure, pour un vélo aseptisé, en tant qu'équipier, le suivi sportif et humain ne le fait pas vibrer ni lui, ni Guimard qui connaît trop bien la musique.
    

  


Raleigh lui propose pour 2016 un nouveau contrat de deux ans, sur le papier alléchant. Matthieu goûte à nouveau aux joies du cyclo-cross sur un mois en s'imposant à Plumelec, Gouesnou, Betton, en terminant 2ème de la coupe d'Angleterre à Milton Keynes et en concluant par une 5ème place au cyclo-cross international de... Lanarvily où il mène pendant plusieurs tours. Auprès de l'organisateur Patrick le Her qui a pris la place au célèbre mage Jean le Hir, auprès du peuple Breton qui se reconnaît en lui, il s'aperçoit que ses années sur route ont boosté sa cote de popularité et que son identité est d'être le roi Breton du Cyclo-cross qui lutte contre l'envahisseur Belge. Son destin semble scellé dans le coeur de granit rose qui bat chez tous les bretons comme dans celui d'un autre mage du Pays des Abers, Jean Paul Mellouet, organisateur de la plus belle course professionnelle sur route, le Tro Bro Léon, qui se termine à Lannilis, autre petit village d'irréductibles tout prés de Lanarvily.

      


Matthieu a la surprise d'apprendre que le programme de course sur route de Raleigh, fors le Tour du Yorkshire gagné par Voeckler qu'il terminera à la 31ème place va se résumer à la portion congrue des critériums du Tour Séries. Il se prépare en Février avec un stage personnel comme il aime à les organiser, dans les cols, ceux d'Asie cette fois, où il grimpe en course le célèbre Doi Inathon en une heure.

  


En juin, peu après le championnat de France sur route, qu'il termine 51ème, on lui apprend que Raleigh n'a pas les moyens de les garder et c'est un soulagement. Ils sont fous ces Anglais ! Il peut, à 27 ans, mature dans sa tête et dans son corps, penser à sa carrière internationale en cyclo-cross qu'il a mis en parenthèse. Il fait le point avec compagne Adeline qui couve leur 1er enfant et il se lance, cette fois, en montant sa propre structure Breizh, aidé par ses innombrables amis proches qui ne peuvent qu'être séduits par sa gentillesse et son rire large et franc, son club de supporters, un vélociste Breton bien sûr (Adrisport) qui lui fournira tous les vélos nécessaires et un club Elite Amateur Breton évidemment, le « Team Pays de Dinan », avec son mage Journiaux ; le tout sous l'assentiment de Cyrille Guimard, trop content de pouvoir exaucer la prophétie du Farfadet de Brocéliande. Matthieu investit dans un camion de moto-cross qu'il habille à son effigie, s'entoure d'un mécano personnel, peaufine sa préparation dans les cols pyrénéens fin Août où il gagne la Marmotte devant les espagnols (5600m de dénivelée).

      


Chrono toujours en main, lors de séances sur le terrain ou bien dans le sable du Lac au Duc en Brocéliande (https://www.youtube.com/watch?v=H2RkbOP5Yfc) Guimard, pour un 1er hiver 2016-2017 où il convient de retrouver des automatismes, a fixé à Matthieu Boulo un seul objectif général et deux particuliers.

Le général c'est participer aux neuf coupes du monde et courses internationales pour accumuler des points UCI, afin de ne pas partir en dernière ligne au départ des cyclo-cross lors de la saison 2017-2018, ce qui est rhédibitoire pour espérer finir bien placé au bout d'une heure tant le rythme est élevé devant et à chaque obstacle derrière les bouchons et chutes fréquentes. Dans ce classement, six des sept premiers sont Belges et sont accompagnés par le jeune prodige Hollandais, Van der Poel, un autre Mathieu. De Las Vegas aux USA en Septembre (il finit 15ème en bénéficiant d'une chute collective qu'il a pu éviter) à Zolder en Belgique le 26 Décembre (38ème en repartant dernier au bout d'un tour puisqu'entremêlé dans une chute), bien que partant systématiquement au départ au fond de la classe, Matthieu est en passe de remplir ce 1er objectif qui se terminera au championnat du Monde du Luxembourg le 31 Janvier, fort pourvoyeur en points. Il est passé de la 456ème place mondiale avec 10 points à la 68ème avec 239 points.

    


Cyrille Guimard, comme tous les téléspectateurs Bretons a même cru rêver au championnat d'Europe de Cyclo-cross de Pontchateau fin Octobre. Matthieu a donné l'impression de pouvoir déjà infliger aux Belges l'affront suprême. Sélectionné en Equipe de France, Boulo, après la mi-course a réussi à revenir sur le groupe de tête et s'est échappé seul après la mi-course pendant presqu'un tour devant tout le gratin européen dont une foultitude Belges. Il a été rejoint par l'un d'eux qu'il n'a pas pensé pouvoir encore suivre... et qui a gagné en solitaire ce championnat, où Matthieu a finalement terminé 13ème . Il n'était pas encore temps.

      


Le premier objectif particulier était, bien sûr, de redevenir champion de Bretagne Elites près de Saint Brieuc. Mission accomplie.

    


Reste le second objectif particulier, se préparer sur les cyclo-cross régionaux aux trois manches du challenge national français afin d'avoir un dossard qui permettra à Matthieu de partir sur la 1ère ligne du championnat de France de Lanarvily, pour espérer le gagner. Avec le dossard numéro 5, malgré de petits pépins sur ces manches du challenge national, la 1ère partie de l'objectif est remplie. Matthieu sera en 1ère ligne au côté des pros Venturini de COFIDIS (le favori), de Mourey et Jeannesson de FORTUNEO, équipe qui a remplacé Bretagne Séché, des Chainel, Gadret et du jeune Koretzky. Ils sont tous talentueux, mais pas bretons.

3/ Ce que représente vraiment Lanarvily ?

Pour comprendre ce qu'est Lanarvily, petit village d'irréductibles Bretons de 350 habitants du Bro Léon, où aura lieu le championnat de France le 8 janvier, pour comprendre qui est Guimard, qui est Boulo, ce qu'est la Bretagne, ce qu'est l'essence du cyclo-cross et du cyclisme, il faut regarder cette vidéo deux minutes entre 5mn55sec et 7mn 55sec : https://www.youtube.com/watch?v=71BFN96B3Us .
Le mage du Pays des Abers, Jean le Hir, surnommé le Vicomte, interpelle en conférence de presse du championnat d'Europe à Pontchâteau les deux Belges Aerts, vainqueur, et Van Aert, le champion du monde ainsi que Van der Poel. Ce sont les trois premiers du championnat. Avant l'apparition du Vicomte, les visages sont ternes comme la plaine de Louvain. Jean les invite pour l'an prochain au cyclo-cross international qui n'a pas lieu cette année à cause du championnat de France déjà organisé trois fois dans la Mecque française du cyclo-cross. En 1982, le championnat du monde y fut organisé également. On disait « Lanarvily, près de Brest ». On dit maintenant « Brest, au Sud de Lanarvily ». Le Farfadet de Brocéliande y voit déjà le théâtre 2018 de l'affront suprême que Guimard fomente quand Matthieu Boulo sera prêt l'an prochain. Le Vicomte est l'envoyé du farfadet qui prépare le terrain. Pour l'heure Matthieu Boulo avec Cyrille Guimard ont préparé le championnat de France.

Les 27 et 28 décembre, ils sont venus reconnaître le circuit avec l'équipe de Bretagne. Ils ont fait un crochet par Brest, chez Eric Berthou pour rencontrer un autre champion de Bretagne puis de France Elites 2016, sur route, qui pourrait gagner un jour la classique Liège Bastogne Liège en Belgique. Valentin Madouas qui, comme Matthieu Boulo a un coeur de granit rose « gros comme ça ». Son père Laurent a été champion de Bretagne et professionnel sous la direction de Guimard, bien entendu.

    


Valentin lui a dit :
- Pour être champion de France après avoir été champion de Bretagne la même année, il faut certes un peu de réussite, mais que le circuit te plaise et te convienne. C'est le cas, non ?
Matthieu a répondu :
- Lanarvily, on peut difficilement trouver mieux pour moi.



Mathieu Boulo est l'héritier logique des Robic, Guimard, Hinault, Madouas et le fils des Berthou, Mellouet, Le hir, Le Her, Journiaux, de tous les Bretons qui ont un jour conquis le monde à vélo plutôt qu'en bateau.

Matthieu doit gagner. C'est écrit. Il est leur symbole. Il est l'élu. Des contrées autour de Saint Brieuc, Dinan, à Rennes, Vannes, Quimper, Morlaix et Brest, tous les habitants doivent affluer le 8 décembre à Lanarvily pour voir Boulo gagner. Il ne va rien lâcher si les bretons sont avec lui. Il va porter ses « sac'h », comme eux.

Avant l'affront suprême qui se terminera un jour contre les Belges.
Ce sera pour plus tard.
L'hiver prochain.
Et cela se finira par un banquet et un grand éclat de rire.



Antoine Vayer